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12 octobre 2021

CORPOWORKING, un projet survitaminé en TBS alumni !

Publié par Anne LAFONT (TBS PROGRAMME GRANDE ECOLE, 1988) | N° 103 - Oui, il y a bien un monde après la Covid !

Pierre Souloumiac est en charge du projet Corpoworking qu’il a initié en Occitanie et qui est appelé à se déployer nationalement. Il nous raconte la genèse de ce projet qui a su mettre autour de la table et d’un commun accord, les entreprises, les partenaires sociaux et les élus du territoire. L’histoire démarre juste avant la crise du Covid. Le confinement ne l’interrompra pas. Bien au contraire, il démultipliera les énergies et confirmera la pertinence du nouveau concept qui emprunte une partie de son nom au coworking dont il s’inspire et l’autre partie à corporate qui suggère l’univers de l’entreprise auquel il s’adresse. Depuis, le projet avance tant et si bien que le premier site corpoworking sera concrétisé dans le courant de l’année prochaine. La recette de cette réussite : une observation fine des changements et des attentes qu’ils font naître, la volonté de construire une réponse à forte valeur ajoutée et en réseau pour garantir la pérennité du projet, la capacité à s’appuyer sur l’ensemble des parties concernées motivées par la réalisation du projet.


 

 RSE  

Pierre Souloumiac (PGE TBS 1988)
Directeur Régional Adjoint Action Logement Services Occitanie

 


Comment tout cela at-il commencé ?


Suite aux ordonnances gouvernementales sur le télétravail de 2018, Action Logement a commencé à observer que des accords de télétravail se signaient dans les entreprises adhérentes. Or le télétravail a bien sûr à voir avec le logement, qui est notre vocation, puisque notre action vise à améliorer le bien-être des salariés par le biais du logement. 

Le télétravail en diversifiant la vocation du logement allait donc faire changer notre métier.  

C’est en partant de ce constat que je m’y suis intéressé pour l’intégrer à notre réflexion et à notre action : qu’allons-nous construire et où, pour accompagner cette transition ?
Donc avant même la crise du Covid qui allait brusquement généraliser ce qui était en devenir, en germination sur notre territoire, nous avions démarré un dialogue avec nos entreprises adhérentes pour connaître leurs attentes et leur regard sur le sujet. Le télétravail à domicile montrait déjà ses limites, tant pour la vie collaborative de l’entreprise que pour les conditions de travail des salariés dont les logements se révélaient souvent inadaptés à cette nouvelle façon de travailler. Ces réflexions nous ont guidé vers l’idée du tiers lieu, susceptible d’accompagner le déploiement structuré du télétravail. 

 

Nous avons commencé par faire avec les entreprises un état des lieux de l’existant en la matière. Le premier enseignement de cette étude a été sans appel : l’offre ne répondait pas aux besoins de ces entreprises. Elle était peu structurée, dispersée et hétérogène. Ce qui ne pouvait satisfaire des entreprises qui attendaient un standard élevé de services, de la simplicité et de la fluidité administrative, ni les représentants du personnel qui eux aussi veillaient à une homogénéité des conditions de travail dans l’ensemble de l’entreprise. L’idée se forme alors d’une solution en réseau de tiers-lieux gérés sur un modèle partagé.

Quel impact le covid a-t-il eu sur ce projet ?

On en était là quand la crise sanitaire éclate brusquement. Le télétravail devient brutalement la règle pour des milliers de salariés. Pour nous, le premier confinement a été un véritable laboratoire grandeur nature pour observer et analyser le travail en distanciation et ses conséquences. Deux enseignants-chercheurs de TBS, Kevin Carillo et Alain Karlsfeld lancent une étude sur le télétravail dont les conclusions sont éclairantes pour notre projet. Ils valident le maintien de la productivité des entreprises en mode télétravail et lèvent les freins du management encore très présents jusqu’ici. Ils confirment aussi que le travail à domicile n’est pas la solution à privilégier : troubles musculo-squelettiques fréquents, aggravation des inégalités dans les conditions de travail mais aussi isolement et enfin problèmes de cyber sécurité.

Fin 2020, nous lançons la co-rédaction d’un cahier des charges associant environ 60 entreprises de la région ainsi que toutes les parties prenantes du projet, partenaires sociaux, territoires, professionnels de l’immobilier, des transitions des méthodes de travail... Le principe général est simple : créer des tiers-lieux localisés à moins de 15 minutes des domiciles des salariés qui les fréquenteront. Rapprocher le bureau des salariés plutôt que de faire venir les salariés aux bureaux. Les entreprises participant aux projets ont alors accepté de nous confier, dans le strict respect du RGPD, les communes de résidence de télétravail anonymisées de leurs salariés de façon à identifier les meilleures implantations de ces tiers lieux au cœur des gisements de salariés susceptibles de télétravailler. Un engagement en faveur du projet inestimable qui nous a permis de réaliser une cartographie précise des sites à retenir avec les bonnes mesures d’impacts. 

Les responsables politiques du territoire ont aussi pesé. Mise au courant de l’avancée de nos études, La Région décide d’appuyer cette action qui promet de contribuer de façon nouvelle à l’aménagement durable de son territoire. Elle s’engage également pour ses propres collaborateurs. Toulouse métropole rejoint également le projet qui va permettre de réduire les déplacements des navetteurs toulousains qui rejoignent Toulouse pour travailler. Dans le cadre du projet Vilagil, se constitue également une structure visant à faciliter l’animation du réseau et le déploiement des implantations.

Bref tout un réseau vertueux se met en place en faveur du corpo-working qui semble bien capable de réunir les intérêts privés des entreprises, les intérêts individuels des salariés, les intérêts collectifs des territoires, pour certains revitalisés pour d’autres décongestionnés… 
 

 

Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Nous avançons sur plusieurs fronts. Tout d’abord, nous avons commencé à travailler de façon très opérationnelle sur certains sites comme la friche industrielle de La Comtesse du Barry à Gimont qui sera le premier à ouvrir ses portes. Pour concrétiser le projet, le réseau TBS alumni a été une vraie valeur ajoutée car notre ambition était de stimuler toutes les intelligences et toutes les volontés en faveur de ce projet. Sur la recherche de lieux appelés à devenir tiers lieux de corpoworking, par exemple à Fronton, ville qui a été identifiée comme une localisation potentielle, je suis en contact régulier avec Patrick Igon (PGE 80), qui m’ouvre de nombreuses portes dans sa ville. Patrick est en train de s’approprier ce 

projet qu’il considère comme porteur pour le développement économique de son territoire et pour la qualité de vie de ses habitants. ( voir aussi l’interview de Patrick Igon ). Pour l’élaboration du cahier des charges et la co-création avec les entreprises, j’ai pu m’appuyer sur Edouard Forzy (bachelor 96), responsable de la Mêlée, un tiers lieu précurseur à Toulouse, inventé il y a 20 ans. Edouard m’a d’abord aidé dans l’idéation du projet. Il a ensuite, alors que les salariés des entreprises impliquées dans la démarche étaient largement confinés chez eux, conçu et animé les ateliers de co-création que nous avons pu réaliser grâce à la solution digitale efficace qu’il a mis sur pied pour nous, malgré et pendant le confinement. Avec Paul Boulanger, consultant associé de PIKAIA (PGE 1994), nous travaillons le concept, l’analyse des déformations des méthodes de travail et des modes de communication provoqués par le travail distanciel et l’optimisation des méthodes de travail à ce mode distant. Avec un cabinet d’ergonomes, Paul étudie pour nous l’émergence d’une valeur ajoutée propre à cette nouvelle cohabitation décentralisée, entre personnes de la même entreprise et entre différentes entreprises. Avec Arnaud Thersiquel (PGE 2013) président de « At Home », nous travaillons sur la proposition commerciale faite aux entreprises et à une gestion interconnectée et cohérente des sites (voir aussi l’interview de Arnaud Thersiquel ). Pour entrer dans la vie des entreprises et des salariés, pour tenir les promesses d’améliorations des conditions de travail, de réaménagement du territoire, de lutte contre la pollution, le corpoworking a besoin de ces compétences complémentaires. Nous nous investissons et investissons dans l’intelligence de ce projet pilote pour garantir sa viabilité et préparer son déploiement national avec sérénité. 


Auteur

Anne LAFONT (TBS PROGRAMME GRANDE ECOLE, 1988)

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