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02 juin 2022

Aujourd’hui, ceux qui ont les meilleures idées portent les projets.

Sophia Martin-Ktiri
TBS 2009
RAISE VENTURES, Investment Co-Head

 

Quel a été votre parcours ?

Après un BAC ES au lycée français de Casablanca, j’ai effectué ma classe préparatoire à Nîmes et intégré TBS en 2005 où je me suis spécialisée en corporate finance. J’ai rejoint le Crédit Equity (Ex-Crédit Mutuel-CIC Investissement) puis basculé côté Front dans les domaines de l’innovation et de la technologie. Avec l’arrivée de mon premier enfant, je me suis tournée vers l'accompagnement des entrepreneurs en intégrant le fonds 360 Capital Partners pour accompagner les startups en amorçage. Dans ces métiers hiérarchisés, l’objectif ultime consiste à devenir associé : ce parcours me paraissait trop long.

J'ai donc décidé de rejoindre les équipes d'Amazon Retail, qui m’a recrutée pour gérer un centre de profit sur le secteur Media & Books. Pendant 2 ans, j’ai rencontré des gens agiles et rigoureux et j’ai beaucoup appris des processus mis en place. Un exemple : Power Point était interdit, et nous devions à la place faire des synthèses d’une page sur un sujet. Cette expérience a aussi soulevé des questionnements sur le sens de mon travail. J’ai alors entendu parler de RAISE et découvert l’investissement à vocation environnementale et sociale. En prenant un café avec les deux fondateurs, Clara Gaymard et Gonzague de Blignières, j’ai compris que l’impact sociétal se manifestait concrètement chez RAISE, les équipes d'investissement reversant 50% de leur intéressement à une fondation qui soutient et aide les entrepreneurs. 

 

Comment se caractérise le leadership au féminin dans votre poste actuel ?

Nous lançons actuellement fonds seed et pré-seed dédié au financement de la Tech responsable, fonds dont je suis co-responsable. Chaque équipe est constituée d’un binôme homme/femme et la parité est absolue à tous les niveaux hiérarchiques. Une mesure innovante pour un secteur plutôt traditionnel ! Petite anecdote par ailleurs : j'attendais mon deuxième enfant lors de mon recrutement et ma grossesse n'a jamais été un frein à mon embauche.
« RAISE seed for good » sera donc lancé début 2022 avec un objectif de 80 M€ pour faire émerger les futurs leaders de la tech responsable.

 

 

Dans votre univers professionnel, le fait d’être une femme a-t-il compté ?

Oui, surtout chez RAISE. Le féminisme est à la mode, ça devient tabou de ne pas avoir de femme dans son équipe. Contrairement à il y a 10 ans, les profils féminins sont recherchés.

 

Avant, le leadership féminin, c’était wonder-woman !
Difficile de se projeter dans ce modèle qui impliquait tant de sacrifices.

 

Quelle est votre vision du leadership ?

Elle a beaucoup évolué. Lors de mon passage chez Amazon, j’ai découvert un leadership méritocratique à l’américaine, basé sur la confiance et l’éxécution et non sur l’ancienneté. Aujourd’hui, il est axé sur le feed back, plus horizontal, moins hiérarchique. Il repose plus sur des skills et compétences que sur l’âge ou l’expérience. Ceux qui ont les meilleures idées portent les projets.

 

Y a-t-il un leadership au féminin ?

Même si je ne veux pas faire de différence, j’ai parfois un biais sur le sujet. Il me semble que les femmes ont parfois plus d’empathie, d'humilité et de finesse dans certaines situations. La parité dans le leadership permet une complémentarité des approches et une diversité des opinions.

 

En quoi cela peut être un plus d’être une femme dans le milieu professionnel ? A contrario en quoi cela peut être inconfortable ?

L’équilibre entre la vie professionnelle et personnelle est difficile, une certaine culpabilité persiste parfois. C’est un cliché mais c’est une réalité. 

Auriez-vous des pratiques et des expériences de management à partager ?

Les pratiques sont propres à chaque secteur. J’ai essayé de mettre en place chez RAISE certaines pratiques d’Amazon, comme le feedback personnel. Il faut partir du principe que le manager est responsable de la performance collective et qu’il est au service de ses équipes.

 

Selon vous, quel rôle jouent les conditions économiques, politiques, sociologiques ou culturelles sur la préhension des postes à responsabilités par les femmes ?

Au niveau politique, la loi Rixain impose l’égalité salariale et une féminisation des conseils d’administration. C’est une initiative louable qui vise les entreprises de plus de 1000 salariés. Au sein de notre portefeuille de participations, les femmes représentent déjà 30% des membres de ces conseils, mais l’objectif est d’atteindre les 50%.

 

Avez-vous vu les conditions des profils de leader évoluer ?

Bien sûr, avant, le leadership féminin, c’était wonder-woman ! Difficile de se projeter dans ce modèle qui impliquait des sacrifices. Aujourd’hui, bon nombre de tabous ont été levés, parfois à la faveur du confinement. Il y a 10 ans, Sheryl Sanberg la COO de Facebook a lancé le mouvement avec son livre « Lean in » (En avant toutes). Aujourd'hui, de nombreuses entrepreneuses et C-levels femmes cassent les codes et s'affirment comme des rôles modèles d'un nouveau genre.

 

Comment favoriser la prise de leadership par les femmes ?

Premièrement, il faut se forcer à se mettre en avant, ce qui n’est parfois pas naturel. Il serait bon pour cela d’avoir des rôles modèles plus diversifiés et pas uniquement « des X-HEC ». Ensuite il nous faut développer la sororité et nous impliquer sur ces sujets en s’engageant sur le terrain (écoles, entreprises).  A titre personnel, je suis engagé aux côtés de « Sista » pour encourager l’entreprenariat au féminin.

 

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